La clairière en cendre [Privé]

Alia’ane se rendait en direction du château, lorsque loin encore de la clairière en cendre, elle perçut, aguerrit par une ouïe fine, la mélopée d’une voix accompagnée d’un instrument.
La totale incongruité d’une telle présence phonique lui fit redoubler de prudence, alors qu’elle entrait dans la dite clairière où se tenait auparavant sa cabane champêtre.
Là, une vieille femme laissait courir ses doigts noueux sur les cordes d’une harpe magnifique, posée non loin du tas de cendre que fût son ancien refuge.

*Cet air, il me rappelle…*

De sa voix chevrotante, la paisible vieille femme laissait fuir une berceuse de sa bouche entrouverte, qui n’était pas sans rappeler un chant très populaire chez les elfes et mères.
Pourtant la scène étrange n’avait pas de pareille, et la gitane mélomane ne semblait toujours pas avoir remarqué sa présence.
Alia’ane se rapprocha donc doucement de son ainée, et inconsciente dans le flot de haine contre la princesse qui la tenait jusqu’alors, elle se fit auditrice de la romance que lui chantait petite sa mère défunte.
Lorsque le chant eut finit, la gardienne se fit surprendre par le regard bleu-vert et puissant que la gitane lui offrait.

-« Je suis désolée grand-mère, je ne voulais pas vous importuner… »

Les mains posées à plat sur les cordes, la gitane de lui répondre en souriant.

-« Cela ne fait rien, justement je vous attendais mon enfant… »

Puis après un bref silence.

-« Je savais que vous viendriez Alia’ane « celle qui fait les liens », j’ai une prophétie ancienne sur vous qui m’a été faite avant votre naissance… »

Après son duel acharné contre des lapins mutants, à jouer contre le groupe de fidèle de la princesse Kuru pour les entrainer vers une mort vengeresse, la chasseresse tombait littéralement des nues.

*Attention, mamie vient de péter un câble !!!*

Mais plus prosaïquement.

-« Je vous demande pardon ? »

La gitane eut un petit sourire à son égard avant de répondre.

-« Connaissez-vous la prophétie du roi vert ? »

Aussitôt, des liens invisibles se firent dans l’esprit d’Alia’ane : souvenirs d’expériences évanescentes et douloureuses physiquement et sentimentalement.
Elle resserrait sur son ventre son pendentif-miroir calligraphié avec la lettre R, où se trouvait le portrait de son amour encéphalique.

Mais soudain pour Alia’ane, cela n’allait plus.

-« Il me semble avoir déjà entendu un prêtre me parler d’une prophétie de roi, mais la couleur ne va pas, c’était orange si je crois… »

La gitane sourit, et lui récitât.

-« Trois roi sous le ciel gouvernent aux destinés de ce monde, sous bien des formes… Il a été fait dans les temps ancien, une prophétie triple concernant l’avènement de leurs conjonctures, sur ces terres acides… »

Puis plus loin.

-« Certains ne font appelés Lords, d’autres ne sont encore que Princes, cependant c’est encore à leurs couleurs qu’on peut le mieux les reconnaître… »

Alia’ane de part son passé, était sous le charme des mots de l’harpiste.

-« L’un est orange comme le légume dont raffole les bêtes vagissante et affreuses, que vous fuyez au mieux…
Un autre à quitté sa forêt depuis des siècles, pour aller vers des combats qui ne seront jamais écrits, mais le vert entache encore le sombre de son esprit…
Le dernière enfin rose et fragile comme la fleur, tout jeune sortit du bac à sable blanc, fait tomber les hommes d’un amour plein de candeur… »

La harpie continuait donc avec le son de sa voie nue, et son parfum à l’excès entourait chaque respiration contenue de la gardienne.

*Apparemment mamie ne doit pas se laver beaucoup, pour se verser autant de fragrance !*

Mais elle ne disait mot.

-« Vous parliez du roi orange à l'instant, je sais que vous avez perdu votre amour dans les recoins d’une tête princière ! »

*Mais elle en sait des choses la vieille*

Resserrant encore plus fort son bijou, la chasseresse attaqua.

-« Mais de quoi vous mêlez vous, et qui êtes vous d’abord pour tout savoir de ma vie ? »

La femme en bleu prit alors un air triste.

-« Je ne suis qu’une vieille dame de Portlabor, je suis la gardienne de la mémoire des prophéties, pour autant que dure ma vie. »

Alia’ane enchaina.

-« Pourquoi donc venir me torturer ainsi ? Si mon histoire vous est familière, vous devriez savoir que mon amour ne peu pas avoir d’existence ici… »

Posant une main noueuse et baguée sur la cuisse d’Alia’ane, comme pour la consoler, la musicienne chuchota.

-« Il existe un moyen, pour délivrer votre amour ! »

En écho.

-« Raphaël… »

Après avoir écouté les recommandations de la vieille femme, Alia’ane s’insurgeât d’une belle manière, la rougeur entachant ses joues autrefois si pâles.

-« Je ne peux pas faire ce que vous me demandez, le rejoindre maintenant serait m’exposer aux yeux des naïfs et ainsi me compromettre ; et puis quel accueil recevrais je, moi qui compte parmi ses plus belles ennemies. »

Retirant sa main noueuse, l’instrumentiste lui laissa le temps de la pause et d’un demi-soupir.

*Et pourtant au point où je suis, cette mission que j’ai rendue suicidaire aux proches de ma haine, la lettre que j’ai laissée au prêtre évanescent… Je ne peux plus rester auprès d’eux et ne rien laisser transparaitre… Mais aller le rejoindre, lui !*

Elle la coupa mentalement.

-« Il est pourtant le seul sur cette terre, à posséder un pouvoir qui vous rendra Raphaël… Et vous êtes la clé qui activera ce pouvoir encore dormant, vous Alia’ane, celle qui fait les liens entre les mondes…»

La gardienne la regarda soudainement d’une étrange façon.

*Est-ce que mamie pourrait au moins deux minutes arrêter de se prendre au sérieux*

Aussitôt de répondre.

-« Vous êtes songeuse ? Peut être que vous ne vous pensez pas encore le courage de franchir ce pas, ou que ce pas puisse être franchit par vous… »

La garde chasse détourna la tête, et soupirant, se parlant à elle-même.

-« Vous avez sans doute raison, il ne me reste plus rien dans cette vie que ma haine pour la princesse Kuru… »

Elle regardait la lente chute d’une feuille encore verte sur le sol déboisé.

-« Et maintenant, vous venez de me remettre ce fol espoir dans le cœur, je ne sais plus que faire… et… grand-mère ???»

Elle regardait de nouveau vers l’endroit où se tenaient encore la gitane et son instrument, et à la place duquel un léger vent invisible flottait, comme pour reprendre la place perdue si subitement par ces anciens locataires.
Alia’ane se dressa sur le champ, à l’affut.

*Merde, elle est passée où la vieille !*

Une voix chantonnant et curieusement plus jeune dans l’air qui se levait, de lui répondre.

-« Suivez votre destin gardienne… Rendez vous auprès de celui qui possède le cristal… C’est votre unique espoir de revoir un jour votre amour perdu… »

Puis après un temps, et un léger coup de vent qui traversa Alia’ane.

-« Rejoignez le château du druide nécromant… »

Et la voix disparue.
Alia’ane cabré dans le zéphyr, remit l’une de ses mèches en place.
Puis elle haussa les épaules et partit dans la direction des domaines maudits du Lord Velvorn…

[HRP : suite dans "le conte de la phalange du phénix" grande place de Tyllen]

Chapitre 16 : A la croisée des chemins

Juste après le départ de la garde chasse, on entendit le bruit de déglutition d’une petite fiole liquide que Gabrielle déboucha à ses lèvres teintes.
Progressivement ses rides s’estompaient, dans ce nouvel ensemble bleu qu’Océane sa servante lui avait aidé à enfiler après son duel marécageux et parme contre l’archange Uriel.
Elle laissa glisser le voile de sa tête gitane, libérant ainsi dans les jeux d’ombres et de lumières des feuillus bordant la clairière, ses cheveux bouclés et blonds qui capturaient le soleil.
Sur son oreille gauche, une harpe en boucle d’or, scintillait gentiment ; passant ses mains fines et baguées derrière sa nuque, pour remettre de l’ordre dans ses phanères prisonniers, le rubis serpentaire à son cou dévoilé brillait d’un cruel éclat désormais.

-« Velvorn sera content, je lui sert sa victime sur un plateau d’argent… »

Un petit rire derrière son éventail flamand apparu dont ne sait où, eut le don d’égailler le décor volcanique de l’endroit.
Soudain son rire se crispa dans un sourire forcé, le dragon à son cou se mouvait insidieusement de manière intangible, mais suffisamment pour que l’archange sente planer une menace.
Les ailes coraux dans son dos s’agitaient à peine, plus que la colombe qui avait rejoint son épaule maintenant dénudée.
Dans la ténèbre et le jour de l’orée de ce lieu, à l’opposée de l’endroit à peine dégagé où se tenait l’astromancienne, une ombre fine se dégageait de l’enfer végétal, pour venir à sa rencontre.
A mesure qu’elle approchait d’un pas nonchalant à l’extrême, la cicatrice verticale sur son œil insolent, l’indécente classe et l’assurance à peine feinte qui se terminait sur un pendentif coruscant, eurent le don de faire réprimer à l’ange de l’eau, un frisson inconvenant.
Arrivé dans son périmètre, il stoppa les lois de la gravité ambulatoire, s’arrêtant à galante distance.

-« Quelle surprise de vous voir en ces lieux étranges… Roi orange… »

Puis après le temps de la politesse.

-« Où devrais-je dire… Lord Meecztow ?»

Le vent des ailes colombines sur son épaule, abritait les mouvements légers et imperceptibles de sa chevelure ; elle le défiait d’un regard amusé et typiquement féminin.

"Mon dieu, déjà trois jours depuis que Tesla est parti. C'est à se demander ce que j'ai pu glander, se dit Lord Meecztow en se matérialisant. C'est fou comme le temps passe vite en dehors de ce monde."

Il était en effet reparti dans son domaine divin après le petit épisode cuniculogénocidaire pour préparer sa véritable arrivée dans ce petit coin d'univers qui commençait à lui plaire. L'épisode des ocs l'avait déçu quant à ses capacités et il avait décidé de revenir "entier" en ces mornes contrées déchirées par l'ambition des puissants émergents.
Aaaah, quel délice que d'arpenter le monde des hommes en pleine possession de ses moyens.
Cela faisait longtemps qu'un tel rassemblement d'âmes fortes et déterminées avait eu lieu et il n'en éprouvait que plus de contentement.

Mais cette nouvelle incarnation ne pouvait se contenter de loger sous les branches de cette sombre forêt, ni dans une piteuse maison bourgeoise que sa renommée lui octroyait dès son entrée en ville. Il fallait voir grand, voir majestueux, voir classe, voir plus impressionnant et écrasant que tout autre. Voir comme lui, en somme.

Lord Meecztow s'assit en tailleur et claqua des doigts. Une réplique parfait du monde se forma à quelques centimètres de lui, brumeuse et irréelle, et il prit un air grave.

Soudain, il s'exclama : "Là ! Oh, oui, ça va être bien", en pointant du doigt une région reculée aux contreforts des montagnes.

Il se releva, prêt à partir, quand il perçut au loin, à l'orée d'une clairière, une présence peu commune.

"Elle a enfin quitté son deltaplane rocailleux. Comme c'est intéressant."

Et, se relevant, il s'avança dans la direction de la jeune et frêle volaille.

[...]

-« Quelle surprise de vous voir en ces lieux étranges… Roi orange… »

Tiens ? Aurait-il déjà reçu nouveau surnom durant son absence ?

-« Où devrais-je dire… Lord Meecztow ?»

Un sourire radieux illumina le visage du Lord, conscient de l'effet de son apparition sur l'ange.

-"Gabrielle ! Quelle affreuse surprise ! - L'ange ne put réprimé un petit cri de surprise - Eh oui, tu n'es pas la seule à connaître ton interlocuteur.

- Que fais-tu hors ton poulailler où la juste raison t'as parquée ?

- " Sans doute la même raison qui vous a fait quitté votre divin potager..."

le Lord éclata d'un rire sonore, empreint d'un amusement réel et d'admiration.
La petite angelotte avait bien du courage et était bien informée. Cela faisait longtemps qu'une engeance terrestre n'avait percé à jour sa divinité. Il était, dans une mesure parfaitement adéquate, aux anges.

Mais son rire et son sourire perdirent lentement toute trace d'humour et une aura de malévolence entoura le Lord. Son sourire si radieux fit place à un rictus courroucé et ses yeux brillèrent de reflets carmins.

En un instant, il s'élança vers Gabrielle et la fit valser contre un arbre, l'une de ses dagues placée sous la gorge fraîche et blanche de la pulpeuse archange.

- "Je connais bien tes méthodes et, bien qu'elles me plaisent en leur forme car elles s'apparentent aux miennes quand je suis malade, je n'aime pas qu'on essaye de m'initier à l'emploi de la vaseline. Qu'est-ce que tu me veux ? Et sourtout, qu'est-ce que tu essayes de faire de ce monde, frêle petite ange ?"

La jeune femme planta son regard bleu vert intense dans les yeux de Lord Meecztow et lui répondit :

- "Le destin de ce monde acide est le sujet bâtard de l'affrontement de trois rois.... A la fin des temps, il n’en restera probablement plus qu’un… Je suis prête à faire tout les sacrifices qu’il faut pour l’accomplissement de la prophétie…»

Puis, pressant contre la dague son cou superbe, à l’oreille du Lord elle chuchote :

- « Même s’il me faut pour cela... tuer un dieu… »

Le beau sourire revint sur le visage du dieu, tandis que celui de l'ange s'étirait à en découvrir une dentition radieuse.

Après avoir profité du parfum enivrant de Gabrielle, Lord Meecztow se retira d'un pas, laissant passer sa main sur les courbes parfaites de l'archange qui laissa échapper un soupir fort à propos, et lui répondit posément :

- "Rien ne pouvait me mettre plus en joie à mon retour. Alors, je te dis à bientôt ... face à toi..."

Et il s'élança d'une volte superbe et gracile vers le cou de Gabrielle qu'il trancha sans peine. Le corps de cette dernière se liquéfia tandis que Lord Meecztow essuyait sa lame gluante en pestant : "Saloperies d'avatars d'eau. Toujours à rajouter du saccharose afin de faire tenir le tout. C'est chiant à enlever."

Puis, sans se retourner, il lança d'une voix puissante : "N'oublie pas de prévoir l'apéro !".

Chapitre 17 : Dos à dos

Au milieu de la clairière irradiée par la lueur tombante du jour bientôt mort, Gabrielle sujette à exposer son dos gémellaire à plusieurs mètres de la marre affligeante et concupiscente, tira sur ses frêles membres et sur ses ailes nacrées dans un réveil inopportun de langueur assoiffée.
Elle sentait la puissance retrouvée du seigneur orangé, qui même à distance d’elle semblait encore la toucher.
Leurs deux dos croisés en un intime contact éloigné, jouait encore sur la libido de notre vierge éhontée.
Lâchant enfin les bras sur sa robe bleuté, l’ange inclinant la tête sur le coté et soupira ; avant de remonter sa gauche sur son cou étranglé, pour du bout de ses doigts délicieusement agités, sur le collier serpentaire venir de se poser.

*Pourquoi les hommes puissants, me font t’ils encore autant d’effets…*

Fermant les yeux sur ses membres fantômes, les marques invisibles d’une palpation maligne entachaient encore sa folle pensée.
Le dragon Léviathan dans son cœur venait envenimer pour la rassurer de son fiel envouteur et de sa voix sombre métronome.

*Ce dieu n’est rien, n’ai pas peur !*

*Son karma est puissant, je ne suis pas à la hauteur…*

*Contre deux archanges élémentaires, ses pouvoirs sont des leurres !*

*Dès lors, Uriel est neutre et se méfie encore de moi, il n’y a rien dans ce juge qui puisse me prêter foi ; Adiel était contre ma destinée, et paye le prix gelé d’un sommeil piégé…
Et mon fol frèr…*

*Tu sais donc maintenant lequel il te faut libérer…*

*Il ne m’est que trop passionné.*

Gabrielle rouvrit ses yeux dans son dos, aveugle pour autant à son nouveau rival, elle sourit de sa pupille à l’obscure clarté en émoi.

-« Ah dieu gourmand, je dresserais la table de ma victoire complète sur les gens de Tyllen… Vous êtes bien sûr mon invité de marque à ce banquet, une tenue correcte et morale pour vous n’est pas exigée ! »

Puis en décollant avec lenteur et charme, l’ange d’un rebond se retourna en l’air et décocha aux pieds du Lord une carte tranchante de tarot cocasse qui vint se planter dans le sol colocase.

-« Adieu… »

L’archange disparut à tous yeux.

[HRP : suite dans la tour des anges en privé]

» [Privé] Amour et Destruction
» [privé] Un mauvais rêve
» Seul et enchaîné... [RP Privé]
» [privé] Premières confessions
» La tour des anges [Privé]