[privé] Un mauvais rêve

[HRP: ceci est la suite d' Amour et Destruction]

Cela faisait maintenant plusieurs heures que la princesse Kuru s’agitait dans son immense lit en baldaquin. Les draps de soie immaculée formant de curieux tumultes avec les mers insondables que recréaient ses longs cheveux châtains défaits sur son visage.
La fenêtre avare venait à peine de livrer les premiers rayons de l’aube nouvelle, pour jouer dans la pièce quelques dessins d’ombres et de lumières sur le corps endormi.
Aucun son ne sortait de sa bouche délicate, crispée par les effets de ses songes, une main sur son front pour vérifier encore qu’elle n’était pas fiévreuse.
J’étais là et seul à veiller sur elle, quand soudain elle émergeât dans un fracas feutré de son onirisme.

-« Où suis-je?? » aligna t’elle à moitié comateuse.

Presque assise dans son trop grand lit de chêne, la couverture distraitement tombée sur ses hanches, elle laissait maintenant découvrir une ravissante robe de chambre avec des petits cœurs rouges partout.
Puis dans un regard semi circulaire comme pour se réapproprier ses lieux familiers, elle posa enfin ses yeux sur moi.
Je me tenais debout comme l’exige la politesse, ses deux yeux clignant anarchiquement dans ma direction je me fis la grâce inutile de lui répondre.

-« Tu es dans ton château, dans ta chambre…»

Elle pose enfin un regard sur elle, comme pour se recentrer enfin dans le présent, ses yeux reflétant une multitude de petits cœurs, elle rougit un moment avant de déclamer.

-« Je le vois bien, mais, qu'est-ce que tu regardes ? »

C’est son éternel sujet d’amusement, mais je ne me fait pas avoir par l’illusion et je prends cette phrase comme le plus charmant des bonjours.
Et pendant qu’elle s’enturbanne avec ses draps en une savante momie, moi de lui répondre.

-« Tu as bien dormis ? »

-« Pas vraiment, tu as du me veiller toute la nuit, il ne fallait pas... » dit-elle de sa petite voix.

Ses yeux s’étaient déchargés à nouveau sur moi, en quittant son activité puérile elle avait laissé comme par un oubli travaillé une épaule découverte.

Moi de lui raconter comment je l’avais trouvé sur les routes alors que je ressentais le besoin de revenir au château, un de ses appels pressant et prescient dont j’ai parfois l’habitude depuis que j’étais son ange gardien.
Qu’on l’avait mise au lit sans délais et avec une pointe d’ironie dans la voie, que c’était bien ses servantes et non moi qui s’étaient chargées de cette tâche.
Que je m’étais confié la mission au combien difficile de veiller sur une princesse endormie et que j'avais accessoirement pris la peine de lui guérir une petite blessure au doigt.

-« Puis je savoir ce que tu faisais seule, allongée sur le sol, non loin d’une montagne de gravats et en pleine nuit ? »

Le ton était d’une inquisition monocorde mais ne se voulait pas pour autant paternel. Depuis la disparition de l’ange des silences, je ne voulais pas qu’elle perçoive ma peine de l’avoir sût en danger mortel.

-« en pleine nuit… »

Elle semblait ramener à elle ses souvenirs comme le font les pécheurs de Portlabor avec leurs filets.

Pendant que la princesse et ses servantes se livraient à un toilettage en règle derrière un paravent lilas, le demi-ange écarta négligemment la tête d’un quart de tour, comme pour effacer rapidement une image qui n’avait rien à voir avec l’imprimé du meuble pudique.

-« Je suis allée parler à Färvien, pourtant tu sais à quel point je ne peux pas le supporter !! »

Evanescent ne put s’empêcher de sourire en silence devant ladite déclaration d’amour, à demi étouffée par les vêtements qu’elle enfilait.
La dernière fois qu’il avait entendu ce même discours sur un prince dans la bouche de sa protégée, il s’était retrouvé deux mois plus tard à célébrer leur mariage en grande pompe dans le château de la princesse.
C’était pour lui l’un des signes évident que le temps du deuil de feu le prince Irwing prenait fin.
Un moment il se dit qu’il aimerait bien qu’elle tienne à d’autres, des propos similaires le concernant ;
mais il écarta immédiatement cette pensée d’un mouvement lent puis progressivement rapide de sa manche devant son visage, si bien que ce dernier se retourna instinctivement vers le paravent qu’il avait quitté quelques secondes plus tôt.

-« Figures toi qu’il a rencontré une jeune femme à la sortie d’un étrange château ! Et qu’elle lui a jeté un sort d’amnésie ! »

Connaissant le prince que par des propos rapportés avec toujours autant de fougue, le jeune Färvien paraitrait vite submergé par n’importe laquelle des connaissances de la vie qu’il ne possédait pas, l’ange s’octroya le pécher d’une pensée.

*Ce sort aurait sans doute été plus efficace s’il avait eut l’effet inverse*

Et c’est en sortant du bois artificiel, qu’elle ajouta dans la foulée.

- « Rien non plus du coté de la cité céleste ?»

Elle était si belle à tourner sur elle-même pour donner de l’effet à sa robe de dentelle aux tonalités pastel, qu’il dut s’échapper bien vite d’une telle source de contemplation, pour donner une réponse à ses propres inquiétudes.

-« Mon paternaile ne donne pas de signe de vie depuis plusieurs semaines, la disparition de l’ange des silences en l’un des sujets brulant dans la cité céleste, rien que par le rang qu’il occupe chez nous… »

La fin de sa phrase comme posée en équilibre dans l’infini des possibles, les servantes parties, la princesse se rapprochant dangereusement de lui, une main dans ses cheveux apprêtés, et l’autre à prendre une barrette en or coincée dans sa bouche.

-« je suis mortellement inquiet » Finit-il par lâcher.

-« Il faut se préparer au pire… Je propose de rassembler une armée, nous auront besoin de toute l’aide possible. Il faudrait réunir l’ordre du cœur, et en discuter. »

Dire que quelques minutes auparavant, c’était plutôt les préparatifs d’un mariage hypothétique qui encombraient inutilement son esprit ;
maintenant tout s’accélérait dans des proportions oubliées, à commencer par son cœur qui battait bien trop vite à mesure que la princesse s’approchait.
Oui la période de deuil était bien finie !
Elle avait la même force à faire se coucher les montagnes qu’il lui avait connut lorsqu’il l’avait accompagné pour porter secours à son peuple malade, le jour de sa première rencontre avec le prince Irwing.

-«Personne n’est venu me demander hier ou ce matin ? »

Moi de lui répondre que j’en aurais été le premier informé si cela avait été le cas, mais qu’en bien même je n’avais eut de cesse de la veiller, je pourrais allez m’en quérir maintenant qu’elle était si vaillante ;
pour enfin rajouter.

-« Je te laisse le temps de réunir tout le conseil et n'oubli pas de prévenir ton petit prince, préviens moi lorsque la réunion commencera. »

La porte se ferma alors sur la pièce vide, dans un bruissement d’aile.
La princesse et l'ange sortirent ensemble pour après prendre deux chemins différents.
Il s'en alla distraitement vers sa chapelle.

[HRP: Kuru et Evanescent sont partis chacun de leur coté. Ceci clôt ce RP]